Avec, en 1940, ses 850.000 habitants dont 67% de citadins dont 280.000 à Bordeaux, le département de la Gironde (10000 km2) ni totalement industriel, ni totalement rural était intéressant dans le cadre régional étudié par le Colloque, M.Bernard Lachaise dans sa communication « les travailleurs de Gironde exploités par le 3e Reich » a enrichi le débat.
Sur cette période un premier constat « Occupé dès juin 40, la Gironde apparaît moins frappée que la moyenne nationale par le chômage. » Pour pallier l’absence d’étude fouillée antérieure, l’Historien découpera son intervention en deux pôles : les Certitudes et les Incertitudes ou plus exactement des pistes de réflexions.
Certitudes : « Le département a beaucoup contribué à l’apport de main-d’œuvre. Ne citant que pour mémoire une première évaluation nettement sous-estimée, il retiendra « entre 16 et 20.000 partants répartis ainsi : Volontariat (entre novembre 40 et juin 42) 3000 ; Relève volontaire (été 42) 2 à 3000 ; 1er STO (loi du 4/09/42) 5000 ; STO (loi du 16/02/43) 9000 avec des pics de mars à août.
Quand aux pistes méritant d’être exploitées l’intervenant en retient cinq.
1. Attitude générale en Gironde :
Bien évidemment, les Partis collaborateurs comme le PPF encouragent la lutte contre le Réfractariat. S’il y eut bien quelques incidents contre des Francistes le 31 janvier 1944 à la Gare Saint Jean, on doit constater que la population girondine n’a jamais organisé de vraie manifestation contre les réquisitions.
2. Sociologie :
Dans les volontaires (17% de femmes avant 1942) en majorité mariés et avec enfants, la tranche d’âge est inférieure à 40 ans mais il y a également des quadragénaires. Les étrangers (Espagnols surtout et Européens de l’Est et du Centre) sont nombreux.
Chez les requis 80% sont célibataires en grande majorité provenant des trois classes 40,41 et 42 ; manutentionnaires, ouvriers du bâtiment ou d’usine… mais dans ce secteur peu de spécialistes.
Les réfractaires sont surtout célibataires ; 60% appartiennent aux trois classes, le nombre augmente fin 43 – début 44. Ils viennent pour beaucoup du secteur secondaire.
3. Travailleurs Forcés en France et en Allemagne :
M.Lachaise n’a pas de documents à commenter sur l’emploi en France notamment par l’organisation Todt des Girondins.
En Allemagne, les permissions ne furent accordées que jusqu’à la fin 43 ; elles n’excédaient jamais 20 jours. 14% des partants en bénéficièrent… et les 3/4 ne repartirent pas.
4. Réfractariat :
D’après les sources ONAC la moitié des réfractaires restent en Gironde surtout dans l’agriculture où comme partout ils constituent une main-d’œuvre à bon marché. 20% environ auraient participé à la Résistance.
5. Solidarité et mémoire :
Dès le 25 janvier 1945 se constitue une Association Départementale des Travailleurs Déportés à Vocation d’Entraide et pour préparer l’accueil au retour. L’Association adhère à la Fédération Nationale des Déportés du Travail créée en octobre 45 et changea de nom par la suite.
Elle a apposé une plaque le 7 décembre 1947 à la gare Saint Jean pour rappeler les convois ; cette plaque brisée par vandalisme en 1996 a été refaite et reposée à l’intérieur de la gare.
En conclusion, M.Bernard Lachaise relèvera les spécificités girondines : « La large contribution à la livraison de main-d’œuvre se répartit ainsi : 1/3 à _ du total des travailleurs appartiennent au volontariat d’avant juin 42 ; 35% sont des requis du 1er STO (fin 42 début 43) soit moins que la moyenne nationale. Le zèle de l’administration et la passivité de la population explique la faiblesse du réfractariat par contre la participation (20%) des réfractaires à la Résistance est importante mais il convient de l’enregistrer avec prudence n’étant pas calculée d’après l’attribution des cartes CVR.